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  • Photo du rédacteurCaroline Zamora

Quand le rap parle de psycho : Nekfeu - Premier pas

Si vous avez lu ma présentation je ne vous cache plus mon amour pour le rappeur Nekfeu. Je ne pouvais donc pas résister à l’envie de vous concocter un petit article sur un de ses morceaux. Aujourd’hui je vous parle de Premier pas, issu de son dernier album, et je vous explique un peu de quels processus psychologiques ça parle.


Mise en contexte :

Pour enregistrer son album Les étoiles vagabondes, Nekfeu a entrepris un voyage avec son équipe (vous pouvez aller checker son film documentaire du même titre). Pendant ce voyage, il a vécu un séisme au Japon et un ouragan aux Etats-Unis. Dans le morceau Premier pas, il raconte les émotions et pensées que ces deux catastrophes naturelles ont suscitées chez lui.


Pour l'écouter c'est par ici : https://deezer.page.link/K6DbtR5gicKgp2Di9


1. La Théorie de la Sélectivité Socio-émotionnelle

"Etrange comme on ressent des pulsions d'amour au contact de la mort ou de son évocation"

Théorie de la Sélectivité Socio-émotionnelle (SST) c'est un terme un peu compliqué pour dire qu'on a à peu près tous une idée du temps qu'il nous reste à vivre et que nos motivations s'adaptent au temps de vie que nous percevons : notre horizon temporel.


Commençons par un petit exercice : imaginez que vous disposez de 30 minutes de temps libre, avec qui préférez-vous partager ce temps ?

  • Un membre de votre famille

  • Un auteur d'un livre que vous avez lu

  • Une rencontre récente avec qui vous semblez avoir beaucoup en commun

Si vous avez moins de 30 ans je suis prête a parier que vous avez choisi une rencontre récente ou l'auteur d'un livre. Par contre, si vous avez plus de 60 ans vous avez très certainement choisi un membre de votre famille. Entre les deux c'est un peu plus compliqué, parce que ça dépend de si on a des enfants etc.


Je suis pas encore voyante, c'est la science qui le dit ! Plus précisément la Théorie de la Sélectivité Socio-émotionnelle (SST).


Un peu de blabla : Laura Carstensen c'est la Queen B de la SST, elle a mené tout plein de travaux sur le sujet dans les années 90 et elle a posé cette question à des jeunes, des moins jeunes, dans un contexte de crise sanitaire, dans un contexte normal et même à des jeunes atteints du VIH.

Les résultats de ses différents travaux montrent que les personnes âgées choisissent en majorité un membre de leur famille alors que les jeunes en bonne santé, dans un contexte normal, choisissent en majorité une personne non familière.

On a d'abord cru que c'était parce qu'on devenait moins sociable en vieillissant. Mais comment expliquer que des jeunes atteints du VIH ou en contexte de crise sanitaire choisissent eux aussi majoritairement un membre de leur famille ? J'ai moi même fait l'expérience pendant le premier confinement du COVID 19 : quel que soit leur âge, la majorité des personnes ont choisi un membre de leur famille.


Et Nekfeu il aurait choisi quoi ?


"Loin de mes terres d'humeur sentimentale, y a pas que la peur que j'ai senti monter

Loin de mes terres, je n'ai pensé qu'aux miens, je n'ai que leurs souvenirs et leurs invocations

Etrange comme on ressent des pulsions d'amour au contact de la mort ou de son évocation"


Premier pas, Les étoiles vagabondes


J'ai pas la réponse, mais je suis encore prête a parier que si on lui avait posé la question à ce moment là, il aurait choisi de partager du temps avec un membre de sa famille.

  • D'après la théorie du management de la terreur : face à la peur de la mort, l'être humain recherche une immortalité symbolique dans le fait d'appartenir et de contribuer à quelque chose de plus grand que soi. "Au contact de la mort ou de son évocation" les individus tendent donc vers des comportements prosociaux envers leurs groupes d'appartenance afin de faire partie d'un tout plus grand que soi et d'être rassuré.

  • D'après la SST : Lorsqu'on dispose de temps devant soi, on est motivé pour faire de nouvelles rencontres et apprendre de nouvelles choses afin de préparer le futur. Alors que lorsqu'on ne dispose pas de beaucoup de temps, on se focalise sur des buts de bien-être et on recherche des émotions positives, notamment auprès de nos proches.


Ces deux explications se complètent plus qu'elles ne s'opposent.


2. L'effet de positivité :


"...les gens ici n'ont pas trop l'air inquiets [...] Ils font la fête et me proposent de trinquer, y a de la bonne humeur à profusion"



Pour résumer, l'effet de positivité serait la conséquence d'avoir des motivations orientées vers un but de bien-être : puisqu'on est à la recherche d'émotions positives, on mobilise ses ressources cognitives pour diminuer l'attention que l'on porte aux émotions négatives et la réorienter vers les émotions positives. Pour les plus curieux, je développerai un peu plus sur l'effet de positivité dans un prochain article.


En attendant, je vous laisse sur ce couplet d'intro de Premier pas qui illustre parfaitement la présence de l'effet de positivité chez les habitants de la Nouvelle Orléans, où Nekfeu se trouvait, à l'annonce de l'ouragan.


"Les nouvelles viennent d'annoncer l'ouragan, l'air est lourd, le ciel est noir interdit de trainer

Le couvre-feu est prévu pour dix-neuf heures mais les gens ici n'ont pas trop l'air inquiets

[...]

Ils font la fête et me proposent de trinquer, y a de la bonne humeur à profusion

Les musiciens s'amusent en improvisant, tous les voisins se fournissent en provisions."


Premier pas, Les étoiles vagabondes


 

Sources


Français :


Vieillard, S. (2017). Le paradoxe de l’âge : une revue critique des modèles explicatifs [1]. L’Année psychologique, 2(2), 221-249.


Anglais :


Carstensen, L. L., et Fredrickson, B. L. (1998). Influence of HIV status and age on cognitive representations of others. Health Psychology, 17(6), 494–503.


Carstensen, L. L. (2006). The Influence of a Sense of Time on Human Development. Science, 312(5782), 1913-1915.


Castano, E., Yzerbyt, V., Paladino, M. et., & Sacchi, S. (2002). I belong, therefore, I exist: Ingroup identification, ingroup entitativity, and ingroup bias. Personality and Social Psychology Bulletin, 28(2), 135–143.


Fredrickson, B. L., et Carstensen, L. L. (1990). Choosing Social Partners: How Old Age and Anticipated Endings Make People More Selective. National Institutes of Health, 5, 335–347.


Fung, H. H., et Carstensen, L. L. (2006). Goals Change when Life’s fragility is Primed: Lessons Learned from Older Adults, The September 11 Attacks and Sars. Social Cognition, 24, 248– 278.


Greenberg, J., Pyszczynski, T., et Solomon, S. (1986). The causes and consequences of a need for selfesteem: A terror management theory. Public self and private self, 72(1), 89-212


Pyszczynski, T., Solomon, S., Greenberg, J., Arndt, J., et Schimel, J. (2004). Why do people need selfesteem? A theoretical and empirical review. Psychological Bulletin.

















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