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  • Photo du rédacteurMaëlle Rouquet

Soyons d'accord sur un désaccord

Toi qui lis ces lignes, sache qu’un point commun te relie à toutes les autres âmes enthousiastes, curieuses, perdues passant sur cette page : vous êtes des êtres sociaux ! (Oui, même vous les introvertis, allez lire l’article de Camille "Pourquoi les introvertis sont des êtres sociaux" si vous êtes sceptiques)

Cette réalité signifie que vous avez tous déjà appartenu à un groupe, qu’il s’agisse d’une appartenance volontaire (cercle d’amis), involontaire (classe scolaire), consciente (hypersensibles) ou inconsciente (on vous voit les mauvais joueurs aux jeux de société qui répétez sans cesse que ce n’est pas votre faute si les autres jouent mal), c’est un fait inéluctable.


Nous avons tous été, sommes et seront membres de multiples groupes, nous avons donc certainement déjà tous expérimenté une situation où une décision devait être prise dans le groupe. Expérience plus ou moins mouvementée...



Mais avant d’arriver au sujet principal, je propose une petite contextualisation : finalement qu’est-ce qu’un groupe ?


Le groupe n’est pas simplement l’addition de plusieurs individualités mais une entité unique avec sa propre consistance indépendamment des identités qui la composent, c’est un lieu où se confrontent les valeurs et les normes de ses différents membres. Le fonctionnement interne au groupe sera caractérisé par la dynamique qui va s’installer entre ses membres, une dynamique faite de confrontations et de compromis ainsi que par les différents rôles que vont adopter ses membres.


Il est surtout important de garder à l’esprit que d’une part un groupe est une entité faite de relations affectives. D’autre part ce qu’il se produit au sein du groupe ne peut être attribué à une seule personne, tout événement qui se produit au sein d’un groupe est rendu possible par l’aval de ces autres membres (puisque qu’ils l’ont validé ou ne l’ont pas empêché).


Hé ouais les gens ça veut dire que lorsque vous critiquerez ce type de votre association pour avoir acheté des gobelets en plastique par centaine plutôt que des écocups, il faudra aussi vous demander pour quelle raison la dynamique dans votre groupe lui a permis de se sentir légitime à prendre cette initiative et pourquoi vous ne les avez pas rapporté au magasin après avoir découvert l’achat.


C’est pourquoi il est important de comprendre les mécanismes de groupe, c’est de l’un d’eux que va traiter cet article : l’effet de FAUX CONSENSUS !


[La vérité les chercheurs en psychologie aime trop conceptualiser des processus psychiques au potentiel conflictuel élevé !]


L’effet de faux consensus est un biais cognitif qui désigne la tendance du sujet à évaluer son opinion personnelle comme commune et partagée par la majorité. Le sujet surestime le degré d’accord des autres avec lui en leur attribuant ses propres comportements et croyances.




(Nop, tout le monde ne pense pas que Le Roi Lion est le meilleur Disney déso pas déso)





L’effet de faux consensus est notamment lié à deux autres phénomènes psychologiques :


- La comparaison sociale, concept issu de la sociologie et de la psychologie sociale qui renvoie au besoin de l’être

humain de se comparer aux autres pour évaluer ses propres attitudes et capacités


- La projection, concept psychanalytique qui désigne le mouvement psychique par lequel la personne transpose

inconsciemment ses propres pensées ou désirs sur autrui


L’association de ces deux mécanismes crée une illusion d’unité des opinions, illusion renforcée par l’interprétation subjective que l’on va faire des petites informations que vont nous renvoyer les autres (EX : elle a soupiré lorsqu’un membre du groupe a exprimé un avis différent du mien, c’est donc qu’elle est d’accord avec moi ! Alors qu’en réalité elle soupirait car elle venait d’entendre quelqu’un dire « au jour d’aujourd’hui »).


Les logiques qui motivent nos choix d’appartenances groupales contribuent à faciliter ce phénomène de faux consensus puisque l’être humain a tendance à s’identifier et se rapprocher de personnes partageant ses idées. Les membres d’un groupe étant unis par des valeurs communes, ils parviennent fréquemment à de vrais consensus et rencontrent moins souvent d’interlocuteurs contestant leurs opinions. Par exemple les rédactrices de ce blog se sont réunies autour d’une passion commune pour la psychologie et la vulgarisation scientifique, les chances d’être confronté au sein de ce groupe à un membre défendant l’idée que la psychologie est une science de 2nd zone est donc très faible !



Le faux consensus, bien que rarement viable sur le long terme, n’est pas pour autant l’expression d’un égocentrisme démesuré ! Au contraire, il peut être une réponse à une situation éprouvante pour la personne.


Le faux consensus peut notamment être un mécanisme de défense pour faire face à une situation menaçante psychologiquement. Considérer son comportement ou son opinion comme partagé par la majorité peut permettre de réduire l’anxiété : « Je suis plus tolérant et ouvert d’esprit que mes parents, les jeunes de ma génération sont majoritairement plus tolérants et ouverts d’esprit que leurs parents donc je ne serai pas rejeté au sein de ma classe du fait de mon orientation sexuelle ».


Le faux consensus peut aussi répondre au désir d’être aimé par les autres dans un environnement social, la personne va se sentir valorisée par le fait de partager la même opinion que des personnes qu’elle juge désirable socialement.


Pour clôturer cet article, je vous rappelle ce que j’ai expliqué plus haut sur le fait qu’un groupe est une entité propre et qu’on ne peut pas attribuer un comportement au sein du groupe à une seule personne. Cela se retrouve totalement dans le faux consensus puisque les autres membres du groupe adoptent fréquemment une posture ambivalente où ils soutiennent en public ou du moins n’expriment pas leur désaccord avec l’opinion majoritaire alors qu’ils la désapprouvent en privé. La « majorité » s’avère parfois n’être qu’une illusion collective (phénomène de la majorité silencieuse) qui perdure grâce à ce type de biais cognitif !


Je vous conseille de garder cette histoire de faux consensus en tête la prochaine fois que vous organiserez des vacances entre amis, ça permettra peut-être d’éviter le scandale lorsque vous découvrirez que non, tout le monde n’a pas envie de dormir chaque jour jusqu'à 11h puis de passer la journée à lézarder sur la plage !



 

Sources :


> Festinger, L. (1971). Théorie des processus de comparaison sociale, dans Faucheux, C., Moscovici, S., Psychologie sociale théorique et expérimentale. Paris/La Haye, Mouton.


> Kaës, R. (1976). L’Appareil psychique groupal, Paris, Dunod.


> Ross, L., Greene, D., House, P. (1977). The « false consensus effect » : An egocentric bias in social perception and attribution processes, Journal of experimental social psychology, 13, p. 279-301.


> Verlhiac, J-F. (2000). L'effet de Faux Consensus : une revue empirique et théorique. In : L'année psychologique, vol 100(1). pp. 141-182.


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