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  • Photo du rédacteurMaelle Rouquet

Tu subis ou tu sublimes ?

Catharsis ? Cathartique ? Cataracte ?



Avant d’entrer dans le vif du sujet, laissez-moi vous Stéphane-Berner en commençant par un petit point définition-historique sur la catharsis, notion peut-être nébuleuse pour nombre d’entre vous.


(J’avoue avoir quelques jeux de mots de piètre qualité en stock mais je serai forte et résisterai à la tentation !)


La catharsis est une forme de symbolisation sensori-affectivo-motrice soutenue par une communion imaginaire, intellectuelle et affective au sein d’un groupe.



Voilà.


Je peux difficilement être plus claire.


Des questions ?





Allez ouvrons la page Secrets d’Histoire et faisons un petit voyage dans le passé jusqu’en Grèce Antique où débute notre récit. Ce sont dans les écrits d’Aristote que nous retrouvons les premières évocations de la notion de catharsis (du grec ancien [katharsis] signifiant “purification, purgation”).


Ce gars sûr d’Aristote employait ce terme pour désigner le phénomène par lequel les spectateurs des pièces de théâtre s’identifiaient aux personnages vivant des aventures tragiques et punis par le destin pour leurs désirs, leurs passions secrètes. Aristote était persuadé qu’assister à ces tragédies grecs permettait aux spectateurs de se libérer de leurs propres sentiments inavouables.



En vivant ces destins malheureux par procuration, les spectateurs seraient purifiés de leurs propres vices !



Pratique n’est-ce pas ? Une pièce de théâtre et hop on peut de nouveau s’endormir sereinement...




Bon. C’est la définition philosophique du concept, il est donc grand temps d’insuffler un peu de psychologie dans cet article (vous êtes pas venus ici pour souffrir hein!)


Freud et Breuer ont proposé une lecture de la catharsis comme procédé thérapeutique utilisé dans le cadre d’une cure psychanalytique. Cette fois le concept de catharsis désigne une façon d’aider les patients à se remémorer leurs expériences traumatiques passées et à se libérer des émotions refoulées qui s’y rattachent. Cette méthode passe par la mise en mots des affects.



La catharsis du domaine philosophique est donc à bien distinguer de la méthode cathartique développée par les psychanalystes, cette dernière poursuivant un réel objectif thérapeutique !





Toutefois, les émotions ressenties devant une pièce de théâtre ou une scène de film/série en lien avec les aventures vécues par les personnages peuvent avoir un effet libérateur sur le spectateur. Pleurer, s’indigner, haïr et prendre en pitié des personnages ne sera jamais équivalent à une prise en charge thérapeutique mais cela pourrait permettre d’extérioriser des sentiments difficiles à manifester dans sa propre vie.


L’art sous toutes ses formes est vectrice d’émotions, le spectateur regarde, écoute et éprouve par identification aux acteurs·rices, il n’est donc pas étonnant que des personnages fictifs puissent provoquer le retour brutal d’affects.


D’autant que les œuvres artistiques sont créées dans des contextes culturels précis, elles entrent en résonance avec le public de manière bien singulière et sont propices à la libération de sentiments refoulés.


Pensez-vous que ce soit un hasard si les bad guys dans les films et séries occidentaux réalisés dans les dernières décennies du XXème siècle soient souvent russes ou allemands ? Ces caractéristiques font des personnages de meilleurs réceptacles aux émotions négatives du public car elles puisent dans l’inconscient collectif hérité des deux guerres mondiales.



Autre exemple, au Japon de nombreux films à haut “quotient lacrymal” sont sortis après la 2nd guerre mondiale et les tragédies vécues par le peuple japonais (bombes atomiques, défaite militaire, occupation américaine). Un moyen de verser les larmes et de libérer la tristesse que les convenances sociales de la culture japonaise empêchait d’exprimer autrement ?


Pour revenir sur une note moins dramatico-déprimante, il a été constaté que la catharsis philosophique survenait plus facilement lorsqu’elle était collective. Vous voyez les éclats de rire de tout le public lors d’un spectacle humoristique? Bah l’effet cathartique collectif n’y est pas totalement étranger.


Bon je crois avoir fait le tour du sujet,


Petit résumé pour ceux derrière qui n'ont pas suivi :


Petit 1 : catharsis “philosophique” et méthode cathartique thérapeutique sont deux choses différentes

Petit 2 : rassurez-vous ce n’est pas car vous ressentez une satisfaction malsaine de voir un vilain mourir (coucou Joffrey) que ça signifie que vous nourrissez le désir secret d’assassiner des gens dans la vie réelle




Sur ce, pleurez, riez, hurlez cher public si cela peut vous faire sentir plus léger quelques instants !




 

Sources :


> Pierre Pellegrin (dir.) (trad. du grec ancien par Pierre Destrée), Aristote : Œuvres complètes, Paris, Éditions Flammarion, 2014, 2923 p. (ISBN 978-2-08-127316-0), « Poétique »


> Breuer J. et Freud S., Etudes sur l’hystérie, Paris, P.U.F., 1956 (1895).


Pour aller plus loin :


> Tisseron, S. (1996). La catharsis purge ou thérapie ?. Les cahiers de médiologie, 1, 181-191.




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